Name: Ministère des Colonies. Administration d'Afrique. Conseil de guerre de Léopoldville - Ministerie van Koloniën. Bestuur in Afrika. Krijgsraad Leopoldstad
Period: 1891-1956
Inventoried scope: 4,5 linear meters
Archive repository: National Archives 2 - Joseph Cuvelier repository
Heading : Colonies
Authors: De Ganck, T. — Rovetta, O.
Year of publication: 2022
Code of the inventory: I43
Ministère des Colonies et successeurs en droit. Administration locale. Conseil de guerre de Léopoldville, ([1891]-1960).
Le Conseil de guerre de Léopoldville est l'un des nombreux tribunaux militaires (1) institués par le Roi et son représentant dans la colonie, le Gouverneur général, au sein de l'organisation judiciaire de l'État indépendant du Congo (1885-1908) et du Congo belge (1908-1960).
La justice militaire est instituée et organisée par le Roi-Souverain par le décret du 22 décembre 1888 (2), peu après l'institution officielle de la Force Publique, l'armée coloniale. Ce décret jette les bases de l'organisation de la justice militaire coloniale, dont les grands principes resteront stables sur l'ensemble de la période.
Les conseils de guerre (au premier degré) et conseils de guerre d'appel (au second degré) sont les instances judiciaires devant lesquelles sont jugés les membres de la Force publique pour toutes infractions au code pénal militaire, mais également au code pénal de droit commun (3). Les civils sont également justiciables des conseils de guerre lors de l'instauration d'un " régime militaire spécial " ou " mitigé ", instaurés en cas d'" instabilité ", d'insurrection ou de période de guerre (4). Au moment de leur création, l'appel des jugements des juridictions militaires est déféré au Conseil de guerre d'appel de Boma où siègent le juge et le greffier du tribunal d'appel.
Les juridictions militaires au Congo (État indépendant du Congo et Congo belge) sont organisées sur le modèle de leurs homologues belges. Cependant, les juridictions militaires coloniales diffèrent de ces derniers par leur imbrication particulière au sein de l'organigramme de la justice civile. En effet, dès 1888, lorsqu'un conseil de guerre est institué dans le ressort d'une juridiction répressive ordinaire, le juge et le suppléant de cette dernière sont aussi, de droit, juge et suppléant du conseil de guerre (art. 3 du décret du 22 décembre 1888). Cette double mission, civile et militaire, vaut également pour le Ministère public. Les juridictions civiles et militaires ne sont donc pas cloisonnées comme en Belgique (5) . Le décret prévoit aussi qu' " en dehors du ressort des tribunaux répressifs ordinaires, les commissaires de district ou les chefs d'expédition dûment commissionnés remplissent les fonctions de juge " (art. 3 du décret du 22 décembre 1888).
En 1887, un décret autorise le Gouverneur général à créer des tribunaux jugeant seulement les justiciables africains ; il s'agira des tribunaux territoriaux. De plus, le code pénal ordinaire ne s'applique qu'aux civils européens. La ségrégation et la dualité du droit (y compris par la définition d'infractions spécifiques aux Africains) sont une constante dans l'organisation du système judiciaire colonial (6). Les juridictions militaires s'en distinguent par leur unicité au regard des justiciables qui y sont soumis. Les conseils de guerre jugent aussi bien les membres européens qu'africains de la Force publique. Mais des conditions particulières s'y appliquent également. Sous régime militaire spécial, les civils européens et africains sont également justiciables des conseils de guerre, mais seul le code pénal ordinaire (et non militaire) leur est appliqué. Si une affaire implique à la fois des prévenus africain(s) et européen(s), c'est le tribunal répressif ordinaire qui est compétent (art. 18). Cette unicité assortie d'exceptions n'est toutefois pas synonyme d'égalité. La Force publique est une institution inégalitaire où les soldats congolais ne peuvent atteindre un grade plus élevé que celui de premier sergent-major et la première école de sous-officiers ne voit le jour qu'en 1958. Les relations entre soldats européens et africains font également l'objet d'un contrôle étroit et doivent, comme cela apparaît dans les directives, contribuer à garantir " le prestige de la race blanche en général " (7).
La justice militaire est la première justice coloniale appliquée sur les territoires conquis ou en voie de l'être. Car si l'établissement officiel des conseils de guerre est postérieur à celui des tribunaux ordinaires, ces nouvelles juridictions succèdent à une justice militaire de fait qui fonctionnait déjà à la veille de la création de l'État léopoldien (8). Ainsi la justice militaire suit de près la conquête territoriale et fonctionne partout où s'engage la Force publique et où l'administration coloniale s'installe. C'est pourquoi le décret de 1888 prévoit qu'en dehors " du ressort des tribunaux répressifs ordinaires, les commissaires de district ou les chefs d'expédition [...] remplissent les fonctions de juge du conseil " (9). Ceci va de pair avec le recours fréquent au " régime militaire spécial " sur les territoires nouvellement occupés (10). Expéditions punitives, ciblage des populations civiles, répression de " rébellions ", les actions de la Force publique sont marquées par une violence extrême. Sous l'État indépendant du Congo, le fait que cette justice militaire applique la loi avec beaucoup de dureté et déborde le cadre légal en prononçant des peines non-prévues par les textes est aussi connue des acteurs de l'époque. Ainsi, le Gouverneur général écrit en juin 1893 que " à différentes reprises, j'ai eu le regret de constater que les tribunaux territoriaux ou les tribunaux militaires prononçaient des peines non prévues par nos lois. Sous prétexte qu'il fallait un exemple, des condamnations à mort ont même été prononcées, alors que la loi ne comminait pas cette peine " (11)
Dès 1889, les conseils de guerre peuvent, comme les autres tribunaux, siéger " dans toutes les localités de leur ressort lorsque l'exige la bonne administration de la justice " (12), ce qui signifie qu'ils peuvent se déplacer pour statuer sur une affaire.
Le nombre et la répartition des conseils de guerre évoluent à mesure que se structure le système judiciaire, système qui épouse les délimitations territoriales et évolue avec elles. Entre 1888 et 1914, des conseils de guerre sont progressivement institués aux sièges des tribunaux répressifs ordinaires et dans les chefs-lieux de districts et de zones où se trouvent des troupes de la Force publique (voir les tableaux en annexe) (13). Le nombre de conseils de guerre actifs augmente progressivement et fluctue durant cette période entre vingt-cinq et vingt-neuf sur l'ensemble du territoire. En 1915, il est décidé d'instituer des conseils de guerre dans chaque chef-lieu de district (voir le tableau en annexe) (14). Cette décision ne transforme pas radicalement l'organisation des conseils de guerre. Il s'agit plutôt de l'harmoniser dès lors que l'ensemble du territoire est administré par l'État colonial. Ce système perdurera jusqu'à la fin de la période coloniale en 1960.
Si la distribution des sièges et ressorts des juridictions militaires est marquée par de fréquents changements dus aux modifications successives des circonscriptions administratives, leur fonctionnement est en revanche caractérisé par une grande stabilité (15). Ainsi, la reprise de l'État indépendant du Congo par la Belgique en 1908 n'affecte ni le fonctionnement ni l'organisation des juridictions militaires. De même, les conseils de guerre restent actifs durant les deux guerres mondiales, bien qu'un Auditorat et des Conseils de guerre en campagne soient à chaque fois instaurés, en sus des juridictions permanentes, pour juger les troupes en déplacement postées aux principaux lieux de conflit (16).
Après la Première Guerre mondiale, les principales transformations dans l'organisation des juridictions militaires sont la création de nouveaux conseils de guerre d'appel. Jusqu'en 1914, il n'existe qu'un seul conseil de guerre d'appel, situé à Boma. À cette date, la Cour d'appel d'Élisabethville, instituée en 1910, devient le Conseil de guerre d'appel au Vice-Gouvernement général du Katanga (17). En 1921, un conseil de guerre d'appel est institué au siège de chaque tribunal de première instance, portant leur nombre à sept pour vingt-trois conseils de guerre (voir les tableaux en annexe) (18). La Force publique est aussi réorganisée à la sortie de la Première Guerre mondiale. En 1919, elle est divisée en troupes chargées de la défense extérieure (" troupes campées ") et en unités chargées de tâches de police (" troupes territoriales "), un changement qui maintient pourtant dans la pratique la confusion entre le civil et le militaire (19)
Si les séries d'archives de dossiers judiciaires conservées attestent du fonctionnement du Conseil de guerre de Léopoldville à partir de 1891 (20), les publications officielles ne mentionnent explicitement son existence que le 28 avril 1896 (21). Comme l'a mis en évidence l'historiographie, ce décalage s'explique par le caractère lacunaire des textes officiels organisant les institutions judiciaires au début de la période léopoldienne, dans la mesure où " aucun d'entre eux ne constitue un tableau d'ensemble de l'organisation judiciaire ; le législateur avance au coup par coup en fonction des circonstances " (22).
Trois hypothèses peuvent être avancées pour établir la date de création du Conseil de guerre de Léopoldville, en l'absence d'informations précises à ce sujet. La première hypothèse postule que, suivant la législation alors en vigueur, la création du Conseil de guerre de Léopoldville a pu avoir lieu dès la mise en application du décret du 12 décembre 1888 attribuant des compétences de justice militaire au juge, au juge-suppléant et à l'officier de ministère public des tribunaux répressifs ordinaires. Le Tribunal territorial de Léopoldville avait en effet déjà été institué l'année précédente, en 1887 (23). Selon une seconde hypothèse, il est également possible que la justice militaire ait fonctionné dans cette région préalablement à l'institution officielle des conseils de guerre fixes, puisque la conquête s'est engouffrée dans le territoire à partir du bassin du Congo pour ensuite progresser vers le nord-est. Enfin, selon une troisième hypothèse, il est encore possible que sa première activité ne remonte qu'à l'année 1891, le dossier du 26 août 1891 ayant reçu le numéro de rôle n°1 (24).
La dénomination des conseils de guerre dans les archives se réfère soit au nom du ressort soit à celui du siège. Dans le cas présent, on retrouve par exemple deux dénominations entre 1891 et 1896, à savoir " Conseil de guerre de Stanley-Pool " ou " Conseil de guerre de Léopoldville ", pour désigner le Conseil de guerre du district de Stanley-Pool, siégeant à Léopoldville.
Lors de la création du Conseil de guerre de Léopoldville, son ressort s'étend au seul district du Stanley-Pool. Le Conseil de guerre de Léopoldville siège dans la même ville jusqu'à l'indépendance, seul son ressort subit des modifications au gré des transformations des délimitations administratives des territoires (25). Il fonctionne d'abord dans le district du Stanley-Pool jusqu'au camp de Bolobo, puis il englobe le Kwango oriental et enfin le Moyen-Congo et le lac Léopold 2. En 1914, le district du Moyen-Congo, dont Léopoldville est alors le chef-lieu, est l'un des douze districts où l'action civile des tribunaux répressifs est suspendue et un régime militaire spécial instauré (26). À partir de 1924, sa compétence territoriale recouvre le district urbain de Léopoldville et les territoires du district du Bas-Congo à l'est de la rivière Inkisi (27)
Les compétences des conseils de guerre, dont le Conseil de guerre de Léopoldville, sont fixées aux articles neuf à dix-huit du décret du 22 décembre 1888. Les conseils de guerre peuvent juger tous les officiers, sous-officiers et soldats de la Force publique, quelle que soit leur origine (28).
Les membres de la Force publique peuvent y être jugés pour toutes les infractions pénales de droit commun ainsi que pour les infractions militaires (29). Les peines prononcées peuvent être des amendes, de la servitude pénale (c'est-à-dire une peine d'emprisonnement) et aller jusqu'à la peine de mort. Toutefois, entre 1895 et 1916, les militaires européens qui encourent une peine de mort sont jugés par les tribunaux de première instance (30). Lorsque plusieurs prévenus sont impliqués dans une cause et que tous ne sont pas militaires, la cause est renvoyée dans un tribunal ordinaire (31).
Le conseil de guerre compétent est celui du lieu de l'infraction, de la résidence du ou des prévenu(s) ou encore celui du lieu où le ou les prévenu(s) sont retrouvés (32). Lorsqu'un membre de la Force publique est impliqué dans une affaire avec un non-justiciable des conseils de guerre, c'est le tribunal répressif ordinaire qui est compétent, sauf en cas de régime militaire spécial (art. 18 code militaire 1888). Lorsque s'applique le régime militaire spécial et que sont donc justiciables devant les tribunaux militaires aussi bien les civils que les militaires, c'est toutefois le code pénal ordinaire qui s'applique aux civils (art. 26 décret 1888). De plus, des différences sont aussi faites entre justiciables européens et africains au sein des conseils de guerre. À titre d'exemple, à partir de 1923, les jugements pouvant faire l'objet d'un appel excluent les " infractions commises par des militaires africains et punissables au maximum de six mois de servitude pénale et de deux mille francs d'amende " (33).
En 1958, une ultime réforme de la justice a pour but de professionnaliser son corps et de mettre fin à la ségrégation raciale dans son fonctionnement (34). Dans ce cadre, les compétences des conseils de guerre sont fortement réduites. Désormais, seules les mutilations volontaires et les fautes militaires graves commises par les soldats et officiers de rang inférieur à celui de major de la Force publique seront jugées par les conseils de guerre (35). Le Conseil colonial motive ce changement par la volonté de donner de meilleures garanties judiciaires à ces justiciables (36). En effet, les délits relevant du droit commun (contrairement aux fautes militaires) sont dès lors jugés devant les tribunaux ordinaires par des magistrats expérimentés, et non plus des militaires de carrière (37)
Les conseils de guerre d'appel sont compétents pour statuer sur les causes jugées en premier ressort par les conseils de guerre. L'appel peut être introduit par le prévenu ou par le Ministère public. Jusqu'en 1921, tous les appels sont renvoyés devant le Conseil de guerre d'appel de Boma (38). À partir de 1921, sept conseils de guerre se partagent les appels en fonction des ressorts.
Suite au décret du 8 mai 1958, les conseils de guerre d'appel sont renommés " cours militaires ". Ces cours restent compétentes pour les appels des conseils de guerre, mais sont désormais aussi les seules compétentes pour juger les mutilations volontaires et fautes militaires graves commises par les militaires de rang égal ou supérieur à celui de major (39).
Le conseil de guerre d'appel compétent pour le Conseil de guerre de Léopoldville est le Conseil de guerre d'appel de Boma puis, à partir de 1921 (40), le Conseil de guerre d'Appel de Léopoldville (41)
Dans le cas de l'instauration d'un " régime militaire spécial " par le pouvoir exécutif, les justiciables civils sont aussi soumis à la juridiction militaire en matière pénale, mais seul le droit commun leur est appliqué (et non le code militaire).
Lorsque le régime militaire est instauré, les jugements rendus ne sont pas susceptibles d'appel ou d'opposition (42), et les peines sont aggravées (43). En 1897, un article 29 est ajouté au décret organique de 1888 afin de punir les révoltes et résistances des militaires par la peine de mort ou une servitude pénale de dix ans minimum (44).
Mesure temporaire, le régime militaire peut être décrété par le Gouverneur général, dans une circonscription déterminée, lorsque la situation sécuritaire et politique est jugée dangereuse, instable ou insurrectionnelle. L'État colonial recourt fréquemment au régime militaire, particulièrement pendant la période de l'État indépendant du Congo.
Pendant la Première Guerre mondiale, l'application de ce régime encombre les conseils de guerre qui se retrouvent submergés de causes. Pour résoudre ce problème, une variante de ce régime, appelé " régime militaire mitigé ", est instaurée en 1917 (45). Ce régime exclut les civils européens des conseils de guerre, sauf si la cause dans laquelle il est poursuivi implique également un ou plusieurs autres auteurs présumés militaire(s) ou africain(s) (46).
Avec la réforme judiciaire de 1958, l'instauration du régime militaire implique la compétence du conseil de guerre pour toutes les infractions pénales, ordinaires et militaires, commises par les membres de la Force publique. Cependant, les jugements sont désormais susceptibles d'appel et d'opposition.
Sous le régime de l'État indépendant du Congo, la justice entre dans les compétences du département des Affaires étrangères du Gouvernement central établit à Bruxelles. Cependant, contrairement à la justice civile, les conseils de guerre relèvent exclusivement du Gouvernement et des instances judiciaires locales. Au Congo, cette compétence régalienne est placée au sein du Gouvernement local sous l'autorité du Gouverneur général qui représente en Afrique le Roi-Souverain, puis le Ministre des Colonies en 1908 à la reprise. Il dirige le gouvernement local situé à Boma puis à Léopoldville, quand cette dernière devient la capitale du Congo belge en 1928.
C'est le Gouverneur général - et les Vice-Gouverneurs généraux (47) - qui a autorité sur l'ensemble de l'administration judiciaire. Il a notamment le pouvoir d'instituer les tribunaux et conseils de guerre, déterminant leur siège et leur ressort, de nommer les juges, de décréter l'instauration du régime militaire, mais encore d'ordonner ou de suspendre des poursuites. Sous le régime du Congo belge, le Ministre des Colonies n'a plus autant de pouvoir en matière de poursuites judiciaires. En effet, il n'est plus en mesure d'obliger le Procureur général à stopper la poursuite de certaines affaires, si ce dernier contredit ses injonctions (48).
L'organisation judiciaire est établie progressivement au sein de l'État indépendant du Congo. La justice est une préoccupation des autorités coloniales dès 1885 en tant que moyen d'imposer l'autorité de l'État sur le territoire, tant vis-à-vis des habitants indigènes que des compagnies commerciales déjà implantées dans le Bas-Congo. En 1887, la Justice devient officiellement l'une des trois directions du Gouvernement local. Le Directeur de la Justice est le chef du personnel judiciaire et participe à l'élaboration de la législation, agissant dans les faits comme conseiller juridique du Gouvernement local (49).
En 1889, est créée la fonction de Procureur d'État qui agit directement sous l'autorité du Directeur de la Justice, puis du Gouverneur général à partir de 1896. Le Procureur devient le supérieur direct de tous les officiers du Ministère public et des officiers de police judiciaire qu'il surveille en principe étroitement. Il maintient aussi l'ordre dans les tribunaux. Enfin, le Procureur d'État est le chef du Parquet. C'est lui, ou par délégation ses substituts, qui exerce les fonctions du ministère public : veiller à la bonne application de la législation, rechercher les infractions et recevoir les dénonciations, instruire les causes et entendre les témoins. Il les exerce au Tribunal d'appel de Boma, dans les tribunaux répressifs ordinaires et dans les conseils de guerre qui s'y rattachent (50). Le titre de " Procureur d'État " change de dénomination pour devenir " Procureur général " en 1906 (51). Un second Procureur général est nommé en 1910 lorsqu'un tribunal d'appel est institué à Elisabethville (52).
Pour permettre la surveillance de l'exercice de la Justice, les Substituts du Procureur doivent transmettre toutes les copies des jugements rendus dans tous les tribunaux et conseils de guerre au Procureur, qui établit à son tour un rapport trimestriel à destination du Gouverneur général (53).
Concernant spécialement l'administration de la justice dans les conseils de guerre, il est décidé en 1903 (54) que les substituts des tribunaux répressifs ordinaires jouent un rôle de conseiller juridique auprès de ceux des conseils de guerre. Ce rôle ne leur donne pas d'autorité ou de droit de surveillance, mais implique néanmoins que les officiers des conseils de guerre soumettent à ceux des tribunaux ordinaires leur instruction pour relecture. Après quoi il revient aux officiers des tribunaux ordinaires de rédiger le projet d'assignation. Aussi, les officiers sont pressés de communiquer toutes les causes à charge d'Européens dès que les dossiers sont complets afin de " mettre le chef du Parquet à même de prendre une décision en pleine connaissance de cause " (55). Toutefois, les officiers des conseils de guerre peuvent, pour rendre la justice plus rapidement et efficacement, décider de passer outre ces dispositions, particulièrement si le territoire est sous régime militaire spécial.
Comme dans les autres tribunaux répressifs, les conseils de guerre sont composés d'un juge, d'un officier du ministère public et d'un greffier. La présence du greffier est indispensable. Par contre, le juge peut assumer les fonctions de l'officier du ministère public s'il est absent, sans que le jugement en soit frappé de nullité (56). Cette disposition est justifiée à la fin du XIXe siècle par le manque de personnel européen disponible pour endosser cette responsabilité (57).
Le juge est nommé par le Gouverneur général (ou par son délégué). C'est ensuite le juge qui désigne l'officier du Ministère public et le greffier.
Le décret organique du 22 décembre 1888 (voir annexe D) prévoit deux cas de figure pour la désignation des membres composant les conseils de guerre, selon que le conseil de guerre est rattaché ou non à un tribunal répressif ordinaire. Dans le premier cas, le conseil de guerre siège dans le ressort d'une juridiction ordinaire. Dans ce cas, le juge, l'officier du ministère public et le greffier de cette juridiction sont de droit ceux du conseil de guerre qui y est rattaché. Ce premier cas de figure est le plus courant après 1914. Mais, durant les premières années de la colonisation, nombre de conseils de guerre sont établis dans des postes et districts encore vierges de toute autre institution judiciaire coloniale. C'est alors le deuxième cas de figure prévu par le décret de 1888 qui s'applique : quand un conseil de guerre se trouve en dehors du ressort d'un tribunal répressif ordinaire, le juge du conseil de guerre est soit le commissaire de district, soit le chef de poste ou de l'expédition de la Force publique. Ce cas de figure est largement appliqué durant la période de conquête territoriale. Ainsi, en 1896, seuls les conseils de guerre de Boma, de Lukungu et de Léopoldville sont rattachés à des tribunaux ordinaires. Dans tous les autres districts et postes de l'État, ce sont des commissaires de districts et des officiers (58) chefs de poste ou d'expédition qui sont commissionnés pour exercer les fonctions de juge des conseils de guerre (59).
Dans un contexte où l'administration de l'État indépendant du Congo est encore en construction, le gouvernement général doit plusieurs fois rappeler que les conseils de guerre doivent être constitués en suivant le cadre légal en vigueur. Ce cadre légal prévoit notamment que le Gouverneur général (ou son délégué) nomme les commissaires de district et les officiers de la Force publique exerçant la fonction de juge dans les territoires où aucun magistrat n'est encore officiellement installé. " Ces prescriptions [...] ont toujours été perdues de vue et ont eu pour conséquence que dans nombre de localités ou bien il s'est constitué des Conseils de guerre illégaux dont les décisions ne pouvaient avoir aucune valeur, ou bien, dans des cas graves, il a été disposé sommairement de la liberté ou de la vie de gens inculpés de délits ou de crimes " (60). Les délits et crimes dénoncés ici ont pu concerner non seulement les porteurs et soldats de la Force publique, mais aussi les populations civiles puisque certains territoires encore non soumis aux juridictions ordinaires étaient placés sous régime militaire spécial. Cette préoccupation vis-à-vis de la légalité des conseils de guerre perdure jusqu'au début du XXe siècle. En 1901, il est rappelé que les preuves de nomination et désignation des membres composant les conseils de guerre doivent être envoyées à la Direction de la Justice afin de pouvoir prouver que ces juridictions sont régulières et agissent avec une autorité bien fondée (61).
Dans les territoires déjà soumis à la justice répressive ordinaire, les conseils de guerre étaient rattachés soit aux tribunaux de première instance, soit aux tribunaux territoriaux. Dans les tribunaux de première instance, le juge est un magistrat docteur en droit. Dans les tribunaux territoriaux, les juges sont les commissaires de district. Appelés fonctionnaires-magistrats, ceux-ci ne sont que très rarement détenteurs d'un diplôme en droit. Le plus souvent, ceux-ci n'ont pour bagage juridique que les quelques notions acquises lors de leur passage à l'École ou à l'Université coloniales. La séparation des pouvoirs est donc relative au sein de la colonie où les responsables locaux peuvent combiner des fonctions exécutives et judiciaires. Dans les tribunaux territoriaux, cette situation est compensée par la présence et le rôle prépondérant des officiers du ministère public. Ceux-ci sont docteurs en droit et leurs réquisitions sont le plus souvent suivies à la lettre par les fonctionnaires-magistrats (62). Cependant, il faut rappeler que dans les conseils de guerre la présence du ministère public n'est pas obligatoire (63).
Á partir de 1913, le décret d'organisation judiciaire prévoit que le juge doit être un militaire. En effet, son article 32 stipule que " les juges titulaires ou suppléants des conseils de guerre sont désignés par le Gouverneur général, parmi les officiers qui résident dans la localité où siège le conseil " (64). Cette disposition est reprise dans les législations consécutives (65).
Le rôle du ministère public dans les conseils de guerre se voit renforcé à partir de 1921. La nouvelle organisation de la justice militaire prévoit que les officiers du ministère public des tribunaux de première instance soient désormais ceux de tous les conseils de guerre établis dans leur ressort (66).
La réforme de 1958 permet la nomination de juges auxiliaires aux conseils de guerre (art. 60) et attribue le droit de nomination des juges des conseils de guerre non plus au Gouverneur général (ou aux Vice-Gouverneurs généraux), mais au chef de groupement de la Force publique (art. 61).
Il n'existe qu'un seul conseil de guerre d'appel, établi au Tribunal d'appel de Boma, entre 1888 et 1914. Entre 1914 et 1921, un second conseil de guerre d'appel est établi au Tribunal d'appel d'Elisabethville. À partir de 1921, un conseil de guerre d'appel est institué dans chaque tribunal de première instance.
La législation organique de 1888 ne spécifie pas la composition de conseil de guerre d'appel en tant que tel. En effet, il explique simplement que " l'appel est déféré à un autre conseil de guerre siégeant à Boma " (67). Le président est le juge du Tribunal d'appel de Boma ou son suppléant. Ce dernier peut s'adjoindre quatre assesseurs si la peine encourue est la mort ou la servitude pénale à perpétuité. L'officier du ministère public est aussi celui du Tribunal d'appel de Boma. Le greffier est celui du Tribunal d'appel qui est nommé par le Gouverneur général (68).
La codification de l'organisation judiciaire de 1896 ne contient pas non plus de titre spécifiquement consacré aux conseils de guerre d'appel. Il faut en l'occurrence se référer à l'organisation judiciaire du Tribunal d'appel auquel est rattaché le conseil de guerre d'appel. La composition de ce Tribunal d'appel change cette année-là. Il est " désormais composé d'un président, de deux juges, d'un officier du ministère public et d'un greffier " (69). Le président et les juges titulaires sont nommés pour cinq ans par le Gouverneur Général (art. 11 et 12). Ils doivent avoir trente ans accomplis au moment de leur nomination, être docteur en droit et avoir suivi le barreau, mais également avoir occupé des fonctions judiciaires ou bien avoir enseigné le droit dans une université pendant au moins cinq ans (art. 13). L'officier du ministère public du Tribunal d'appel de Boma est le Procureur d'État (qui devient le Procureur du Roi du tribunal de première instance après 1906). Il remplit la fonction d'officier du Ministère public du conseil de guerre d'appel (70). Les jugements du tribunal d'appel ne peuvent être rendus qu' " au nombre fixe de trois juges, y compris le président " (71). Quant au greffier, celui-ci est nommé par le Gouverneur général et fait fonction de greffier du conseil de guerre d'appel également.
Dès 1913, la législation organisant la justice détaille les dispositions pour les conseils de guerre d'appel (72). Le Président est de droit le juge du tribunal d'appel. Le président désigne ensuite les deux autres juges du conseil de guerre d'appel. Celui-ci les choisit " parmi les officiers de la Force publique en garnison ou de passage au siège ordinaire du conseil de guerre d'appel ou dans les localités avoisinantes " (73). Par ailleurs, le greffier est désormais celui du tribunal de première instance.
La réorganisation de la justice militaire de 1921 (74) opère une décentralisation du pouvoir judiciaire, pour la mettre en adéquation avec la décentralisation du pouvoir exécutif, largement entre les mains des Vice-Gouverneurs généraux entre 1914 et 1933. La décentralisation du pouvoir judiciaire passe par l'établissement d'un conseil de guerre d'appel dans chaque tribunal de première instance. Le ressort de chaque conseil de guerre d'appel est celui du tribunal de première instance auquel il est rattaché. Toutefois, les principes de composition des conseils de guerre d'appel ne changent pas, mais sont simplement adaptés à la nouvelle situation. Le juge et le greffier du tribunal de première instance sont de droit respectivement les président et greffier du conseil de guerre d'appel. Le président nomme deux juges parmi les officiers de la Force publique " d'un grade au moins égal à celui du prévenu " (75). L'officier du ministère public est le Procureur du Roi. Les jugements doivent avoir été rendus avec trois juges, y compris le président, pour être valides. Si le président ne peut assumer deux juges par suite de manque de personnel disponible au sein de la Force publique, la cause peut être renvoyée à un conseil de guerre d'appel voisin.
Les conseils de guerre d'appel jouent un rôle important étant donné l'absence de séparation stricte entre les pouvoirs dans le Congo colonial. En effet, tant le président que l'officier du ministère public des conseils de guerre d'appel sont obligatoirement docteurs en droit et dotés d'une solide expérience ou expertise judiciaire. Le pouvoir colonial compte sur les conseils de guerre d'appel pour garantir l'équité des décisions judiciaires. C'est ce qui ressort notamment du rapport d'évaluation remis par le Conseil colonial au sujet du projet d'organisation de la justice militaire de 1921. Le Conseil colonial souligne à cette occasion que les Vice-Gouverneurs généraux peuvent nommer et révoquer des juges, ce qui met en péril l'indépendance de la justice et peut mener à des abus. Des amendements sont proposés, mais le Ministre des Colonies Louis Franck (1868-1937) les refuse tous. Il argumente que ces dispositions ne sont pas neuves et qu'il n'y jamais eu d'abus. Selon lui, " aucune plainte n'a été formulée contre le système qui a toujours été en vigueur et, d'ailleurs, l'appel est, dans tous les cas, ouvert au prévenu " (76). Le texte est finalement adopté en l'état. Quelques analyses préliminaires ont révélé que les juges des conseils de guerre d'appel ont effectivement fréquemment révisé à la baisse les peines infligées aux prévenus en première instance. Il appartiendra aux recherches futures de déterminer si ces révisions sont à mettre en lien avec une critique du système judiciaire dans le chef des juges des tribunaux d'appel (77).
Les réformes judiciaires de 1923, de 1933 et de 1958 ne modifient pas l'organisation des conseils de guerre d'appel.
Terminologie
L'appellation " archives coloniales " (78) admet deux acceptations. Dans un sens restreint, on limite son utilisation aux archives produites par les rouages de l'administration coloniale (archives publiques), dont font partie les archives du Conseil supérieur. Mais l'autorité coloniale est multiple et le système de domination qu'elle sous-tend n'est pas l'apanage des dépositaires de la puissance publique. L'expression " archives coloniales " peut dès lors, dans un sens plus large, être utilisée pour désigner tout fonds d'archives, public ou privé, témoignant du phénomène colonial : archives des missions religieuses, des entreprises, des particuliers. C'est cette acceptation étendue que nous plébiscitons. De nombreuses réflexions épistémologiques sont actuellement menées qui étudient les liens entre phénomène colonial et documents d'archives.
L'expression " archives africaines " (79), quant à elle, a un sens plus restreint et est spécifique au contexte belge. Il s'agit du nom d'usage désignant les fonds et collections d'archives relatives à la colonisation belge (1885-1962) ayant été placées sous la garde du " service Archives africaines " au Ministère des Affaires étrangères. Ces archives africaines sont en cours de transfert vers les Archives de l'État et seront conservées aux Archives générales du Royaume 2 - Dépôt Joseph Cuvelier. Il s'agit à la fois d'archives publiques (essentiellement celles de l'État indépendant du Congo, du Ministère des Colonies à Bruxelles et du Gouvernement général à Léopoldville) et d'archives privées (des archives de cabinets ou de particuliers ayant été cédées au Service Archives africaines ou achetées par lui). Initialement, l'expression " archives africaines " désigne uniquement les archives produites en Afrique, puis par extension l'appellation est appliquée à l'ensemble des archives coloniales sous la garde du Service Archives africaines.
Des archives coloniales sont également conservées dans les archives d'autres départements, successeurs en droit de certaines compétences et donc de certains fonds d'archives. Mais ces ensembles documentaires ne tombent pas sous l'appellation " archives africaines " (80).
Sur toutes ces questions, nous renvoyons le lecteur au guide des sources relatives à la colonisation belge et plus particulièrement à son introduction (81), qui fait entre autres le point sur la question de l'accès aux archives coloniales en Belgique (82).
Statut
Le Ministère des Colonies organise une gestion centralisée de ses archives dès 1949, aussi bien dans la Métropole que dans la Colonie. À Bruxelles, un archiviste rejoint la section " Information, presse, bibliothèque " (83) et s'attache à traiter en priorité les archives de l'État indépendant du Congo et les archives du département antérieures à 1914 (84). L'organisation d'un " bureau des archives " est entre autres la conséquence de la dispense accordée au Ministre des Colonies de verser ses archives aux Archives de l'État, obligation à laquelle sont normalement tenus les départements ministériels (85). L'arrêté royal du 12 décembre 1957 exécutant la loi de 1955 relative aux archives réaffirme cette dispense, alors que la plupart des autres administrations publiques est soumise à une obligation de versement de ses archives de plus de 100 ans (86). En 1962, à la suppression du Ministère des Affaires africaines, les archives du département sont placées sous la garde du Ministre des Affaires étrangères (87) et sous celle du Ministre du Commerce extérieur et de l'Assistance technique, disposant tous les deux de la même dérogation (88).
En 2009, la loi de 1955 relative aux archives est modifiée. Le délai de versement obligatoire des archives publiques fédérales est réduit à 30 ans (89). L'article 9 de l'arrêté d'exécution du 18 août 2010 réglant les modalités de transfert aux Archives de l'État prévoit que " le Service public fédéral Affaires étrangères, Commerce extérieur et Coopération au Développement ainsi que le Ministère de la Défense sont dispensés du transfert de leurs archives de moins de cinquante ans à condition que : 1° la pérennité, l'authenticité, l'intégrité, le classement, l'accessibilité et la lisibilité de ces archives soient assurés, comme défini aux articles 14, 15 et 16 ; 2° le public puisse consulter ces archives dans les mêmes conditions qu'aux Archives de l'État ". Concrètement, cela veut dire que ces départements sont autorisés à conserver leurs archives vingt ans de plus que les autres administrations (soumises elles à une obligation de transfert de leurs archives de plus de 30 ans), à condition toutefois qu'ils les gèrent en bon père de famille. Ces délais sont aujourd'hui épuisés pour les archives africaines, qui doivent dès lors faire l'objet d'un versement aux Archives de l'État.
Transmission et conservation
Les archives africaines ne sont conservées en un même lieu, par le même service d'archives, qu'à partir de 1997. Avant cette date, on peut distinguer quatre ensembles documentaires :
- les archives de l'Administration métropolitaine confiées au Ministre des Affaires étrangères ;
- les archives de l'Administration métropolitaine confiées au Ministre du Commerce extérieur et de l'Assistance technique ;
- les archives de l'Administration d'Afrique provenant du Congo, confiées au Ministre du Commerce extérieur et de l'Assistance technique (et dont une partie importante est temporairement déposée aux Archives générales du Royaume) ;
- les archives de l'Administration d'Afrique provenant du Ruanda-Urundi, confiées au Ministre du Commerce extérieur et de l'Assistance technique.
Par l'arrêté royal du 23 mai 1962 répartissant les attributions ministérielles en matière d'Affaires africaines (90), les archives produites à Bruxelles (essentiellement par l'Administration centrale de l'ÉIC et le Ministère des Colonies), dont l'ampleur actuelle est estimée à 3,5 kilomètres linéaires, sont dévolues pour une partie au Ministre des Affaires étrangères, par ailleurs Ministre du Ruanda-Urundi (archives et documentation relatives aux frontières, aux terres, au cadastre, aux mines, etc.) et pour une autre partie au Ministre du Commerce extérieur et de l'Assistance technique (archives et documentation relatives au commerce, aux transports, aux statuts des sociétés, à la propriété industrielle et aux études économiques).
Ces dispositions ne pourront être appliquées à la lettre et poseront de gros problèmes de fonctionnement. Le problème n'est pas tant que les archives dépendent désormais de deux autorités. Même s'il y a deux ministres, il n'y a qu'une seule administration : le Ministère des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et de l'Assistance technique. L'ancien service des archives du Ministère des Affaires africaines (91) est d'ailleurs intégré au sein de l'organigramme du Ministère des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et de l'Assistance technique : le " Service Archives africaines ", distinct du " Service des archives " gérant quant à lui les archives produites par le département. En réalité, la mise en œuvre de l'arrêté de 1962 est surtout compliquée par la redistribution des compétences au sein d'organigrammes complètement différents de celui du Ministère des Colonies. Pas moins de huit autres ministres se voient attribuer des compétences de l'ancien Ministère des Affaires africaines, sans qu'aucune disposition ne soit prise pour l'identification et le transfert des dossiers correspondants. Le fait que l'arrêté ne fasse pas la distinction entre archives historiques et dossiers présentant encore une utilité administrative, ne contribue pas à clarifier la situation. Dans les faits, les archives relevant de compétences tombées en désuétude et une partie importante des archives n'ayant plus d'utilité administrative passent directement sous la garde du Service Archives africaines.
Quant aux archives de l'administration d'Afrique, une partie d'entre elles est expédiée en Belgique au moment des Indépendances (92). La sélection est opérée de manière non concertée, parfois en catastrophe ; la décision de laisser sur place les archives " de gestion ", pour n'envoyer en Belgique que des archives " de souveraineté ", elle aussi unilatérale, n'est volontairement pas respectée (93). Ces sélections et ces déménagements par bateau et par avion sont opérés entre 1960 et 1961 pour le Congo et en 1961 et 1962 pour le Ruanda-Urundi (94), dans des conditions très différentes. Ils concernent en tout une ampleur estimée à quelque 6 kilomètres linéaires. Le Ministre des Affaires africaines étant dans l'incapacité de libérer les espaces disponibles pour les conserver, un accord est conclu avec l'Archiviste général du Royaume, Étienne Sabbe, dès 1959 : les archives de l'administration d'Afrique provenant du Congo seront déposées aux Archives de l'État, mais resteront sous l'autorité du Ministre (95). Un travail de reconstitution des fonds, malmenés lors de leur transfert en Europe, est entamé par une équipe composée d'archivistes de l'État et d'anciens fonctionnaires coloniaux. Les archives arrivées plus tard du Ruanda-Urundi connaissent quant à elles une conservation distincte, puisque leur plus faible volume permet au Ministère du Commerce extérieur et de l'Assistance technique de les prendre en charge lui-même.
En 1997, le Ministère des Affaires étrangères reprend la main sur les archives confiées aux Archives de l'État et assume pour la première fois la conservation de l'ensemble des quelque 9,5 kilomètres linéaires d'archives africaines. L'historique de la conservation des archives africaines devra être résolu ensemble documentaire par ensemble documentaire.
Classement et description
Les archivistes du " bureau des archives " du Ministère des Colonies choisissent de conserver les archives de leur département sous la forme d'une seule grande collection de fonds, munie d'un système de double numérotation et dont le classement matériel ne correspond pas au classement intellectuel. Les ensembles documentaires sont placés à la suite les uns des autres, au fur et à mesure de leur arrivée, et les portefeuilles qui les contiennent sont numérotés. Le Service Archives africaines du Ministère des Affaires étrangères reprend ensuite à son compte le système de gestion mis en place par ses prédécesseurs et continue à enrichir la collection. Une deuxième collection, suivant le même principe d'ordonnancement, est créée pour les archives provenant d'Afrique, dont sont issues les archives des conseils de guerre et notamment les archives du Conseil de guerre de Léopoldville ; une troisième pour une partie des archives du Personnel d'Afrique. En tout, cela représente près de 50.000 portefeuilles, auxquels il faut ajouter quelques fonds conservés de manière autonome.
Pour distinguer ces ensembles les uns des autres en magasin, une lettre est accolée au numéro de portefeuille : CC pour les archives du Conseil colonial, H pour celles du Service de l'hygiène, SPA pour celles du Service du Personnel d'Afrique, FP pour Force publique, GG pour Gouvernement général, GG-Justice pour Gouvernement général - Justice, etc. Chaque portefeuille contient plusieurs dossiers. Ces dossiers portent (pour la majorité des fonds en tout cas) une numérotation distincte de celle des portefeuilles, qui court de 1 à X pour chaque ensemble documentaire. Pour identifier ou pour commander un article en salle de lecture, il fallait donc fournir deux numéros : le numéro de portefeuille et, à l'intérieur de celui-ci, le numéro du dossier. Le présent inventaire supprime cette double numérotation et la remplace par une cotation simple.
Les archives du Conseil de guerre de Léopoldville sont issues de la collection d'archives précitée provenant du Congo belge. Ces archives ont subi de multiples traitements entre le moment de leur arrivée en Belgique dans les années soixante et la création du présent instrument de recherche. Ces différents traitements sont à l'origine des principes de classement qui leur ont été appliqués.
Cette histoire mouvementée des archives des juridictions militaires de l'État indépendant du Congo et du Congo belge a donc donné lieu à la création de trois numérotations successives. La première numérotation est celle créée originellement au moment de la production des documents et de l'inscription de l'affaire au rôle du Greffe. La seconde est créée durant les années soixante par l'archiviste de l'État Philippe Muret. Il inventorie alors sur fiches les fonds d'archives des conseils de guerre et conseils de guerre d'appel et crée une seconde numérotation de ces dossiers d'affaires jugées. Enfin, la troisième numérotation a été celle attribuée au Ministère des Affaires étrangères après 1997.
Au moment de leur prise en charge aux Archives de l'État au début des années soixante (96), les archives de l'administration d'Afrique sont conditionnées grossièrement (emballées dans des caisses et des colis) et sans système d'identification. Les archivistes ont alors entrepris d'identifier, de trier et de classer les archives provenant du Congo belge en trois grandes catégories : les archives administratives, les archives judiciaires et les archives du cabinet du Gouverneur général. Les archives des conseils de guerre sont alors incluses dans l'ensemble des archives judiciaires, qui contient les fonds des différents tribunaux et parquets. Ces fonds judiciaires sont reconstitués et organisés par les archivistes de l'État selon la structure d'organisation judiciaire en place en 1959 et en ordonnant les séries de dossiers selon le numéro d'inscription au rôle des affaires.
Plus tard, l'archiviste Philippe Muret inventorie sur fiches les fonds d'archives des conseils de guerre et conseils de guerre d'appel (97). Il inventorie majoritairement des dossiers de procédure d'affaires jugées, mais répertorie également quelques registres et dossiers émanant des greffes des tribunaux et des parquets (98). Muret classe, numérote et établit un relevé détaillé sur fiches de tous les dossiers de procédure des affaires jugées, tandis que les registres et dossiers émanant des greffes sont simplement décrits (99).
Son travail d'inventoriage s'est accompagné d'une remise en ordre matérielle et intellectuelle des archives. Pour certaines séries, il procède en rassemblant des archives éparses par siège. Pour d'autres, il extrait également les dossiers produits par les juridictions militaires des séries constituées par les juridictions civiles, créant ainsi de nouvelles séries. Comme nous l'avons souligné plus haut, les conseils de guerre étaient en effet le plus souvent établis aux sièges des tribunaux ordinaires. De ce fait, les dossiers et archives des tribunaux ordinaires et des conseils de guerre étaient souvent gérés par le même greffier. Ceux-ci ont parfois inscrit les affaires ordinaires et militaires dans un même rôle, créant des séries " mixtes ". Les dossiers produits par les juridictions militaires ont été extraits par Muret de ces séries " mixtes ", pour créer des séries distinctes. Il a dans ce cas attribué un numéro d'ordre à ces dossiers, en plus de leur numéro d'inscription au rôle. Aussi, lorsque plusieurs séries de dossiers existent pour un même siège (100), Philippe Muret les ordonne de manière chronologique et les identifie par les termes " ancienne série " ou " nouvelle série ", ou encore par des numéros (1ère, 2e, 3e, etc.). La numérotation qu'il établit reprend donc jusqu'à trois informations : le numéro de rôle et deux autres numéros créés par lui (un numéro d'ordre par série et un autre par dossier). Philippe Muret avait reporté son référencement sur les couvertures des dossiers ou, quand celles-ci étaient fort abîmées, sur de nouvelles chemises utilisées pour les conditionner. Dans ce dernier cas, les chemises annotées par Muret ont été conservées avec le dossier.
Le classement de Philippe Muret a constitué la base du classement actuel, moyennant quelques ajouts, corrections et modifications. Une table de concordance incluse à la fin du présent document permet de connaître les références attribuées par Philippe Muret à chaque dossier de procédure d'affaire jugée par le Conseil de guerre de Léopoldville.
Lorsque le Ministère des Affaires étrangères reprend la gestion des fonds en 1997, les archives des juridictions militaires se trouvent intégrées à deux ensembles :
- les registres et dossiers des greffes des tribunaux et des parquets, dont ceux concernant les juridictions militaires " fixes " ainsi que les Auditorats et Conseils de guerre des troupes en campagne, sont incluses dans l'ensemble du Gouvernement général de Léopoldville (GG) ;
- tandis que les dossiers de procédure d'affaires jugées devant les conseils de guerre et conseils de guerre d'appel se trouvent dans l'ensemble du Gouvernement général de Léopoldville - Justice (GG-Justice).
Les pièces étaient identifiées au sein de l'ensemble GG par une double numérotation. Cependant, seuls les numéros de portefeuilles étaient utiles pour repérer les archives des juridictions militaires. Le présent inventaire supprime cette double numérotation et la remplace par une cotation simple. Au sein de l'ensemble GG-Justice, les dossiers n'étaient identifiés que par une simple numérotation. Une table de concordance entre les anciennes cotations utilisées au Ministère des Affaires étrangères et les nouvelles cotes attribuées au sein du présent inventaire est incluse à la fin de cet instrument.
En 2014, un Memorandum of understanding est signé entre le SPF Affaires étrangères, dépositaire des archives africaines, et les Archives de l'État pour organiser le transfert de ces fonds et collections. La loi sur les archives, depuis sa modification en 2009, oblige en effet le SPF à transférer aux Archives de l'État ses archives de plus de 50 ans (101). Mais, pour définir les termes d'une transaction impliquant près de 10 kilomètres linéaires de documents, la signature d'un protocole d'accord s'avère indispensable. C'est à nouveau une équipe mixte, composée d'agents du SPF et de membres du personnel des Archives de l'État, qui se met au travail. Il s'agit :
- de mettre aux normes les instruments de recherche existants pour correspondre aux standards internationaux (ce qui implique de revoir et d'affiner les descriptions existantes) ou de doter d'un instrument de recherche les fonds non encore ouverts à la recherche ;
- de faire correspondre classement intellectuel et classement matériel ;
- de doter les unités archivistiques d'une cotation numérique simple et continue ;
- de conditionner les documents dans des chemises et boîtes non acides.
Un chantier exigeant et de longue haleine (102) qui débute en 2014.
Le transfert des archives des juridictions militaires a été effectué durant la première phase du projet DIGICOLJUST aux mois d'octobre à décembre 2020. Le travail de préparation a consisté en l'identification et l'analyse préliminaire de portefeuilles sélectionnés sur la base des instruments de recherche disponibles au Ministère des Affaires étrangères. C'est aussi au cours de ce travail préliminaire d'exploration que le relevé des archives sur fiches établi par Philippe Muret a été retrouvé dans les magasins d'archives du Ministère des Affaires étrangères. Ce travail a abouti à la présélection de 212 articles - dont 29 appartiennent au Conseil de guerre de Léopoldville - qui ont été transférés, après décontamination, aux Archives de l'État, où une analyse archivistique plus approfondie a été réalisée en vue de leur classement entre janvier et juin 2021. Les fonds des juridictions militaires ainsi que les fiches réalisées par Philippe Muret ont été transférés aux Archives générales du Royaume 2 - Dépôt Joseph Cuvelier les 7 et 15 décembre 2020.
Le présent fonds rassemble les archives produites par le Conseil de guerre siégeant à Léopoldville.
Les archives conservées s'étendent entre 1891 et 1956, soit sur quasiment l'intégralité de la période de fonctionnement de l'institution (ca. 1891-1960). La très grande majorité des archives sont les dossiers de procédure des affaires jugées (1174 numéros d'inventaire sur 1183 au total (103)). Il s'agit des dossiers contenant les principales pièces produites au cours de l'instruction puis du jugement des affaires militaires.
Des registres de gestion et de suivi des affaires ont également été conservés (au nombre de sept), mais ceux-ci ne couvrent que les années 1911 à 1950. On retrouve un seul registre au rôle, dans lequel sont inscrites chronologiquement les affaires en vue de leur jugement au conseil de guerre (couvrant les années 1928 à 1947). C'est à ce moment qu'un numéro de rôle est attribué aux affaires. Les registres de rôle indiquent notamment le nom et la fonction du ou des prévenu(s), mais renseignent également les faits pour lesquels ils sont jugés (les " préventions "). Davantage de registres de recouvrement des frais de justice ont été conservés (couvrant les années 1911 à 1950). Après leur inscription au rôle, les affaires sont inscrites aux registres d' " état des frais " dans lesquels sont notés au fur et à mesure de l'avancement de la procédure, les montants des taxes qui seront redevables à la clôture de l'affaire. Après le jugement, le registre des " amendes et frais de justice " permet de savoir quelles sommes sont déjà ou doivent encore être payées et sous quels délais. Contrairement aux registres de rôle, ces registres de recouvrement ne renseignent ni les préventions motivant les poursuites, ni la fonction du ou des prévenu(s). Cependant, en l'absence de registre au rôle, les registres de recouvrement s'avèrent des outils utiles pour connaître la chronologie d'une affaire ou identifier des dossiers manquant.
Très peu de dossiers produits par les services des greffes spécifiquement dans le cadre de la gestion administrative du Conseil de guerre de Léopoldville ont été conservés. Nous ne disposons en l'occurrence que de deux dossiers produits après la Seconde Guerre mondiale concernant la désignation du personnel judiciaire. Cette situation est à nouveau la conséquence du rattachement des conseils de guerre aux sièges des tribunaux ordinaires. Ces dossiers de gestion générale des services des greffes seront dès lors à retrouver dans les fonds des tribunaux ordinaires (104).
Les affaires jugées en première instance par le Conseil de guerre de Léopoldville et qui ont ensuite fait l'objet d'un jugement en appel ne sont pas incluses dans le présent fonds. Dans le cas d'un renvoi en appel, les dossiers de première instance sont envoyés au greffier du conseil de guerre d'appel qui les intègre aux dossiers de procédure des affaires jugées en appel. Les registres de rôle permettent de connaître les références des causes qui ont fait l'objet d'un appel pour les retrouver dans les fonds concernés. Pour les causes en provenance de Léopoldville, les conseils de guerre d'appel concernés sont celui de Boma puis de Léopoldville (105).
Langues et écriture des documents
La plupart des pièces décrites dans le présent inventaire sont rédigées en français.
Les archives du Service des archives africaines ne donnent aucune information sur les opérations de sélection et de tri effectuées au cours du temps. Des éliminations et des pertes ont néanmoins indéniablement eu lieu ; ainsi les dossiers de procédure des affaires jugées entre juillet 1903 et décembre 1908 inclus n'ont pas été retrouvés. En l'absence de registres au rôle ou de suivi des frais de justice couvrant la période, le nombre précis de dossiers manquant durant ces quelques années est inconnu.
Aucun tri, aucune élimination n'ont été effectués à l'occasion du transfert du présent fonds d'archives aux Archives de l'État.
Le présent fonds d'archives est clos. Des dossiers distraits du fonds sont cependant susceptibles d'être retrouvés parmi les autres fonds et collections des archives africaines en cours de transfert aux Archives de l'État.
Les archives du Conseil de guerre de Léopoldville font partie de l'ensemble plus vaste des archives judiciaires produites durant la période coloniale (1885-1960). Les archives des juridictions militaires doivent donc être envisagées dans ce contexte historique et archivistique plus large.
Au sein du système judiciaire colonial, les juridictions civiles et militaires ne sont pas entièrement séparées, que ce soit sur le plan administratif ou même judiciaire. En effet, les juridictions militaires sont instituées aux sièges des juridictions civiles et sont administrées par les mêmes greffiers. Par ailleurs, comme expliqué plus haut, il n'existe pas d'Auditorat militaire en dehors des périodes des deux Guerres mondiales. C'est le ministère public civil qui est compétent pour les instructions. Les juridictions militaires sont encastrées au sein du système judiciaire civil et il ne s'agit pas de deux systèmes judiciaires parallèles et indépendants comme en Belgique à la même époque. Cette organisation a historiquement eu pour conséquence que les greffes administrent fréquemment les différentes juridictions d'un même siège de façon concomitante, menant à l'époque à la production de séries " mixtes " (de dossiers et de registres), reflétant les compétences des deux types de juridictions.
Il a été décidé de ne pas démanteler ces séries " mixtes " - selon le principe de respect des fonds - et de rendre visible la constitution organique de celles-ci. Dès lors, on pourra également retrouver des documents relatifs au fonctionnement des juridictions militaires parmi les archives des Greffes des juridictions civiles du même siège.
Ce classement se justifie par deux raisons principales. Premièrement, en rassemblant les dossiers relatifs à différentes juridictions, les dossiers des Greffes des juridictions civiles se situent à un niveau plus général que ceux exclusivement dédiés aux juridictions militaires. Deuxièmement, les juridictions civiles ont eu une activité plus importante en nombre de causes jugées et la majorité des pièces de ces dossiers relatifs aux différentes juridictions d'un même siège concernent l'activité des juridictions civiles. En conséquence, seuls les dossiers d'archives exclusivement relatifs au Conseil de guerre de Léopoldville sont ici décrits. Les archives des séries " mixtes " précitées ont cependant également fait l'objet d'une identification et d'un relevé au kilomètre dans le cadre du projet DIGICOLJUST (106).
Les archives du Conseil de guerre de Léopoldville ont été classées de manière fonctionnelle et chronologique au sein de deux grandes séries, à savoir les documents de nature administrative, d'une part, et les documents en rapport avec la procédure judiciaire, d'autre part. La première série rassemble les dossiers constitués par le service du Greffe dans le cadre de la gestion générale du conseil de guerre (par exemple : instructions, personnel, correspondance, etc.). La seconde série réunit les registres et les dossiers constitués de manière sérielle à partir de l'inscription au rôle et pendant tout le déroulement de la procédure judiciaire des affaires instruites et jugées au conseil de guerre. En outre, les dossiers de procédure sont rassemblés au sein de l'inventaire selon leur provenance originelle (rôle du Tribunal territorial, du Tribunal de première instance ou du Conseil de guerre de Léopoldville). Un classement chronologique est appliqué au sein de chaque série.
Les archives publiques de plus de 30 ans versées aux Archives de l'État sont en principe librement consultables en vertu de l'article 3 de la loi sur les archives du 24 juin 1955 (modifiée par la loi du 6 mai 2009), dans les conditions établies par le règlement en vigueur dans les salles de lecture des Archives générales du Royaume et des Archives de l'État dans les provinces.
Toutefois, sont inconsultables :
- les documents classifiés, conformément à la loi du 11 décembre 1998 relative à la classification et aux habilitations, attestations et avis de sécurité, modifiée par la loi du 3 mai 2005) ;
- les archives de moins de 100 ans contenant des données à caractère personnel, en vertu de la loi-cadre du 30 juillet 2018 relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel. Cette loi met en œuvre sur le territoire belge le RGPD ou Règlement général sur la protection des données (Règlement UE 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016). Une exception à ce principe sera faite si les faits sont déjà connus du public (par exemple par voie de presse), si les intéressés ont donné leur accord préalable à la consultation des documents qui les concernent ou si ceux-ci sont décédés, ou enfin si la recherche est menée à des fins scientifiques. Une dérogation peut alors éventuellement être obtenue. Elle doit être introduite, sous la forme d'une déclaration de recherche, auprès du dépôt conservant les documents visés et sera évaluée par l'Archiviste général du Royaume ou son délégué.
La reproduction des actes (consultables) de plus de 30 ans est en principe libre mais est soumise au tarif et au règlement en vigueur aux Archives de l'État.
Une partie du présent fonds d'archives est constituée de documents sur papier pelure, un support fin, léger et translucide, composé de pâte chimique. Le lecteur les manipulera avec précaution.
Les archives des juridictions militaires ont subi un processus de décontamination car elles avaient été affectées par les micro-organismes. Cependant, les dossiers de procédure des affaires jugées du Conseil de guerre de Léopoldville sont globalement en bon état physique. Elles ont par ailleurs été intégralement numérisées et sont partiellement consultables sur le site internet des Archives de l'État.
Pour comprendre l'organisation des archives reprises dans le présent inventaire, il est utile de rappeler leur histoire. Lorsque les archives produites dans la colonie ont été " évacuées " du Congo vers la Belgique en 1960, un travail de mise en ordre et d'inventorisation des archives judiciaires est démarré.
L'archiviste Philippe Muret travaille alors spécifiquement sur les dossiers de la justice militaire (107). Il a réalisé :
- Un instrument de recherche préliminaire sur fiches ;
- Un index des infractions avec les affaires et les références correspondantes ;
- Une compilation et extraction des dossiers relatifs à la justice militaire qui se trouvaient dans d'autres séries d'archives judiciaires. On peut donc dire que Philippe Muret a " créé " des séries thématiques " artificielles ". Par exemple, les dossiers d'affaires jugées contenus dans les séries 2, 3, 5, 6 et 7 du conseil de guerre de Léopoldville se trouvaient initialement dans les archives des tribunaux civils du même district et ont été extraits par Philippe Muret.
Cet inventaire est une version revue et augmentée de ce premier instrument de recherche sur fiches. La présente édition offre une étude institutionnelle, un classement retravaillé et une cotation continue.
Des tables de concordance ont été établies entre les anciennes et les nouvelles cotes ; elles sont disponibles en annexe.
L'ensemble des registres ainsi que la totalité des dossiers de procédure des affaires jugées par le Conseil de guerre de Léopoldville ont été numérisés (108)Les copies numériques publiquement accessibles sont consultables sur le site internet des Archives de l'État.
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VAN GRIEKEN, E., et VAN GRIEKEN-TAVERNIERS, M., Les archives inventoriées au Ministère des Colonies (Mémoires de l'Académie royale des Sciences d'Outre-Mer. Classes des sciences morales et politiques, in -8°, fasc. II/70), Bruxelles, 1958, p. 5-15.
CORNET, A., Punir l'indigène : les infractions spéciales au Ruanda-Urundi (1930-1948), dans Afrique & histoire, vol. 7, 2009/1, p. 49-73.
GODDEERIS, I., LAURO, A., VANTHEMSCHE, G., Le Congo colonial. Une histoire en questions, Renaissance du livre, 2020.
LAURO, A., Maintenir l'ordre dans la colonie-modèle. Notes sur les désordres urbains et la police des frontières raciales au Congo belge (1918-1945), dans Crime, Histoire & Sociétés / Crime, History & Societies, vol. 15, n° 2, 2011, p. 97-121.
MULLER, F., PIRET, B., ROUSSEAUX, X., TOUSIGNANT, N. (dir.), Dire, appliquer et diffuser le droit. L'action des gens de justice au Congo belge (1908-1960), dossier des Cahiers du CRHiDI (Histoire, droit, institutions et société), vol. 42, 2020.
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DE CLERCK L. et LAMY É., (éd.), L'ordre juridique colonial belge en Afrique centrale. Éléments d'histoire, Bruxelles, 2004.
Cet instrument de recherche a été réalisé dans le cadre du projet Brain-be 2.0 DIGICOLJUST (Violence coloniale, agencéité subalterne et patrimoine archivistique partagé : une plateforme digitale de sources judiciaires coloniales). Ce projet est financé par la Politique Scientifique Fédérale et coordonné par les Archives de l'État (Pierre-Alain Tallier, Delphine Lauwers), la Vrije Universiteit Brussel (Benoît Henriet) et l'Université libre de Bruxelles (Amandine Lauro et Pieter Lagrou). Il est mis en œuvre par trois chercheurs : Tommy De Ganck (Archives de l'État), Ornella Rovetta et Renaud Juste (ULB-VUB). Cet inventaire résulte donc d'un travail collectif.
La description générale du fonds a été rédigée en décembre 2021 et juin 2022 par Tommy De Ganck, assistant scientifique du projet DIGICOLJUST et archiviste aux Archives générales du Royaume 2 - Dépôt Joseph Cuvelier, et Ornella Rovetta, chercheuse au sein du projet DIGICOLJUST (et avec la collaboration de l'ensemble de l'équipe du projet DIGICOLJUST ainsi que de Marie Van Eeckenrode, archiviste aux AGR2). Ils ont réalisé l'inventaire, entre l'été 2021 et l'hiver 2022.
Le travail de remise en ordre matérielle du présent fonds, mais également son conditionnement et sa cotation ont été exécutés aux AGR2, par Tommy De Ganck et Ornella Rovetta avec l'assistance d'étudiants jobistes (Thijs Costers, Antonin Radivoje, Nyala Nauwelaers et Paul Devos) auprès des Archives générales du Royaume. Son transfert aux Archives générales du Royaume 2 - Dépôt Joseph Cuvelier, les 7 et 15 décembre 2020, a été coordonné par Delphine Lauwers et Tommy De Ganck, tous deux archivistes auprès de ce dépôt.
Tableaux des conseils de guerre et des conseils de guerre d'appel
1 - 2 | Dossiers du Greffe relatifs aux désignations du personnel judiciaire. 1941-1953. | ||||||||
1 | Prestations de serments des juges-titulaires et juges-suppléants (envoyées par le Procureur du Roi du Parquet de Première instance de Léopoldville). 1943-1953. | 1 chemise | |||||||
2 | Copies certifiées conformes de nomination et notifications de remplacement des juges-titulaires et juges suppléants. Désignations et prestation de serment des greffiers assumés (envoyées par le Procureur du Roi du Parquet de Première instance de Stanleyville, le Commandant du 2eme Groupement P.O. et le Chef du Service provincial du Contentieux et du Personnel). 1941-1953. | 1 chemise |